Que se passe-t-il avec le Brexit ?

L’ancienne premier ministre Theresa May a subi des humiliations répétées suite au rejet par le Parlement de son accord sur le Brexit. Boris Johnson n’a guère fait mieux. En dépit de ses déclarations selon lesquelles il préférait « être mort dans un fossé » que de demander un nouveau prolongement du délai du Brexit, Johnson, toujours en pleine vie, a dû se résoudre à demander à Bruxelles justement ce prolongement. Les théâtralités constantes de Johnson posent une question plus profonde. Comment se fait-il que le processus du Brexit se passe si mal ? En résumé, le Royaume-Uni a connu un échec catastrophique pour ce qui est de son image de marque.

Que faire, ne rien faire

Depuis le début, le Brexit souffrait d’un manque criant de planification. L’ancien premier ministre David Cameron a donné son accord au référendum pour plaire à ses alliés hostiles à l’UE, sans penser un moment qu’il pouvait réussir. En effet, Cameron a demandé au Foreign Office de ne pas se préparer à l’éventualité d’une décision de la nation de quitter l’Union européenne.

Durant la campagne, on a accordé remarquablement peu d’attention à l’organisation du processus du découplage du Royaume-Uni de l’Europe. Au lieu de cela, les leaders des partisans du Brexit lancèrent des appels plein d’émotions sur les immigrants assortis de réclamations exagérées sur le finacement futur de la santé. Au lieu de préparer à des décisions politiques difficiles, ces leaders s’accrochèrent à une vision brumeuse et naïve du Brexit.

Dans tout ce discours sur un « meilleur accord » pour leur pays, les dirigeants ont semblé avoir oublié que l’Europe avait toutes les raisons pour forcer la main au Royaume-Uni et qu’elle demanderait par ailleurs la réalisation de ses engagements existants envers l’Union européenne. Le tableau idyllique de la campagne pour le Brexit contraste fortement avec la situation difficile dans laquelle les négociateurs britanniques se retrouvèrent à Bruxelles. Non seulement les attentes irréalistes creusèrent un fossé de défiance avec les Britanniques, mais le défaut de planification entraîna des divisions politiques qui affaiblirent la position de négociation du Royaume-Uni. Au lieu d’articuler un plan de sortie clair à l’avance, le gouvernement britannique semble improviser ses décisions les plus importantes. 

Une autre année de négociations

Négocier un ensemble complexe d’accords économiques et juridiques entre le Royaume-Uni et l’Europe n’est sûrement pas facile. Toutefois, les dirigeants britanniques ont rendu ce processus bien plus difficile. Deux décisions désastreuses prises en 2017 sont en grande partie à l’origine du blocage actuel. La première d’entre elle fut d’avoir recours à l’article 50 et d’entamer le compte à rebours de 2 ans pour quitter l’Union européenne. Lorsque l’accord sur le Brexit s’est avéré être plus litigieux que prévu, le Royaume-Uni fut obligé de se dépêcher pour tenir le délai qu’il s’est lui-même imposé. Reconnaissant par la suite l’impossibilité d’arriver à un accord dans les temps, le gouvernement de Theresa May fut obligé de demander à deux reprise un prolongement. Johnson a maintenant demandé un troisième prolongement, mettant une fois de plus à mal la crédibilité des dirigeants britanniques.

La seconde erreur du gouvenrment May consista à organiser des élections anticipées en juin 2017. Espérant sortir renforcés, les conservateurs au gouvernement s’attendaient à accroître leur majorité parlementaire. Au lieu de cela, le scrutin s’est retourné contre eux. Ils furent contraints d’entrer en coalition avec le Parti unioniste démocrate d’Irlande du Nord (DUP) pour se maintenir au pouvoir. Liés à leur partenaire minoritaire au sein de la coalition, les conservateurs perdirent le contrôle du Brexit. Au lieu d’être en mesure de négocier un accord « conservateur » du Brexit, ils durent rechercher un accord à même de convenir au DUP. Des aspects de l’accord approuvé par le DUP suscitèrent l’opposition de certains conservateurs, anéantissant ainsi les efforts de May pour parevenir au Brexit et exacerbant  les graves dissentions au sein du parti conservateur.

Il n’y a pas de bonne solution

Les leaders britanniques empirèrent une situation déjà difficile en perdant la confiance du peuple. Avant le vote, la rhétorique hyperbolique et parfois franchement violente des responsables de la campagne accentua encore les clivages nationaux. Après le scrutin, la désorganisation du gouvernement et son manque visible de préparation pour mener le Brexit à bien éroda encore plus la confiance des électeurs. Le festival actuel de menaces et d’ultimatums semble aliéner encore les dirigeants du peuple.

Au lieu d’assurer la direction, le leadership eut recours à des jeux politiques. Il en fut notamment ainsi lors de la tentative de Boris Johnson de suspendre le parlement durant plusieurs semaines, en vue de limiter les possibilités de contrôle du dernier accord sur le Brexit. Celle-ci a non seulement suscité un tollé dans toute la classe politique, mais fut aussi censurée par la Cour suprême britannique. La réponse du Parlement, qui interdit toute sortie de l’UE sans accord préalable, marqua une nouvelle escalade. Le dysfonctionnement politique porte un coup aux institutions britanniques dans le pays et à son statut à l’étranger.

Finalement, les échecs des dirrigeants ont réduit la politique britannique à une farce, dont le Brexit constitue la chute.

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